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Date de création : 18.05.2010
Dernière mise à jour : 28.01.2014
131 articles


Chapitre 1 / Ruptures (1)

Publié le 24/07/2012 à 05:53 par travail-famille-patrie
Chapitre 1 / Ruptures (1)

- On dirait que tu ne m’aimes plus murmure t-il.

Elle regarde droit devant elle et finit par laisser tomber, d’une voix neutre, insultante :

- Quelle idée !

- Tu as changé en une nuit ; même pas : en une heure. C’est à cause de ce qu’on s’est dit ?

Elle se remémore les propos échangés, la violence des mots. La facilité déroutante à les prononcer. La lame était mince et effilée mais elle s’attendait à davantage de résistance. L’expression « comme dans du beurre » lui revient. Elle l’a cruellement atteint. Elle n’en conçoit aucun remords ni aucune crainte. Elle le hait tellement désormais. A cause des sales mots qu’il lui a jetés lui aussi, son couteau planté dans le dos. En quelques phrases mauvaises, ils ont su détruire leurs assises, le sens profond de leur vie. Des sarcasmes orduriers ont suffi pour tuer l’amour qu’elle lui portait et de faire de lui un salaud parmi les autres. Il a perdu son aura ; ce n’est plus qu’un mâle aux aguets.


Elle est l’oie blanche que l’on élève pour la manger, le temps venu. Les hommes sont ainsi : forniqueurs, toujours au service de leurs propres désirs. Comme il doit être voluptueux pour lui de se fabriquer une image qui n’aura pas d’autre passé que lui-même. Origine garantie ! Produit de la ferme ! La haine qu’elle voue aux autres finit par déborder sur lui. Peu à peu elle le place dans le même sac à mépris.

- Tu sais qu’on doit tout se dire ! Fait-il. C’est la moindre des choses. Tu es ma femme !

- Non, répond elle.

Il encaisse ce nouveau coup de griffe. Mais pourquoi est-ce que tout s’écroule, bon Dieu ? Pourquoi est-on en train de mourir pour de bon ?

- Tu n’es plus ma femme ?

- Je ne l’ai jamais été. On a joué à faire semblant.

- O merde, pourquoi es-tu soudain si cruelle ?

- C’est un alexandrin, non ?

Elle compte les pieds sur ses doigts :

- O mer de pour quoi es-tu sou dain si cru elle. Oui, c’est un alexandrin. Tu vas pouvoir écrire en vers, comme les mecs de la Pléiade.

- Mais c’est épouvantable ! hurle t-il ! Je t’interdis de me parler ainsi, petite saloperie ! Je n’existe que pour toi ! Je vis à ton heure, au gré de tes caprices de gamine.

- Eh bien, il va falloir que tu t’arranges pour vivre pour toi, maintenant. Il y a plein de bonnes gens encore frais qui ne demandent que de t’aider à avoir un avenir, mon vieux.


Il se met à crier n’importe quoi. Il a stoppé sa marche sur un terre-plein dominant la côte. A cet endroit les roches sont rouges. La mer s’étale, bleue et grise, avec des sillages blancs. Un île à la con, de loin, est pareille à un bateau ancré dans la rade.

Il avance comme un fou vers elle.

- Ma chérie ! Mon amour ! Ma toute petite ! Mais qu’est ce qui t’arrive ? Qu’est ce qui te prend de me poignarder encore, et bien plus cruellement que ce qui nous est arrivé hier soir ? Qu’ai-je fait qui puisse justifier cet abominable revirement ?

- Disons que mes yeux se sont ouverts, répond-elle.

- Ouverts sur quoi ?

- Ben, sur la réalité.

- Et c’est quoi, la réalité ?

- Tu es un homme seul, moi une femme seule ; nous n’avons aucuns liens en fin de compte.

- Nous étions fous amoureux !

- C’est pas un lien ça !

- Et tout les autres, sale garce ? Les liens de la tendresse ? Les liens du chagrin ?

Il s’éloigne d’elle pour s’approcher du garde-fou protégeant la route du gouffre.

Il contemple l’abîme avec convoitise.


- Et tu as voulu que nous partions en vacances tout les deux ! lance-t-il par dessus son épaule.

- J’ai tenté de continuer…

Il revient vers elle.

- Comment ça ?

- Ce matin, comprenant que je te peinais, je me suis dit : « il faut faire marche arrière, essayer de reprendre la vie habituelle. » Alors, je me suis accroché à ce projet de vacances avec toi. Mais pendant que tu discutais avec ce type dans le train, j’ai eu la certitude que je me trompais. Ces vacances, ce n’est pas la peine, tu peux les annuler ; je m’en fous. Je vais rentrer chez moi.

Il ouvre grand sa bouche pour plus d’oxygène. Il voit passer un enfant sur la route au bras de sa grand-mère. Ils marchent d’un bon pas, en serrant le bas-côté. Il les regarde s’éloigner à contre-jour, silhouettes noires. Il est tenté de s’élancer derrière eux.

- Tu ne vas pas encore pleurer, hein ! grommelle-t-elle.

Il sonde ce visage aimé qu’il ne reconnaît plus. Elle est devenue une autre.

Tout le monde meurt.


A suivre.